5. Le modèle du cheminement en parallèle et en interaction : le principe de dualité

L'objection qu'il convient d'adresser au modèle du dépassement spéculatif est la suivante : si l'intention admise comme première est dépassée par un point de vue supérieur, plus englobant, la réalité qui motivait l'intention première n'est pas anéantie pour autant : elle demeure et l'homme doit s'en préoccuper. Il convient donc d'admettre que la pensée passe au point de vue supérieur à certains moments, tandis qu'à d'autres elle est sollicitée par son intention première, et dans cet aller-retour il est clair qu'elle entre à nouveau en crise si elle sombre dans l'incohérence ou la contradiction. La conséquence du mouvement typique de la reconnaissance est donc le cheminement de la pensée sur deux voies parallèles, en principe cohérentes et non-contradictoires :

Reprenons, à titre d'illustration, les deux mouvements du Discours de la méthode : Descartes a été déçu par le système scolaire basé sur l'autorité et, par suite, il fait valoir la voie de la recherche personnelle : il est clair que les écoles ne perdent pas leur raison d'être par suite de cette restructuration et qu'elles ont désormais à cheminer en parallèle avec la recherche personnelle. Semblablement, en ce qui concerne le deuxième mouvement, la conviction de pouvoir tabler sur la bienveillance de Dieu chemine dès lors en parallèle avec la recherche méthodique de la vérité.

Le modèle du cheminement en parallèle s'applique à de nombreuses situations[1]. Il met en garde contre la propension à réduire une voie à l'autre, c'est-à-dire à simplifier la situation. Il met en garde, en d'autres termes, contre le dogmatisme et contre les prétentions au dépassement spéculatif. Il permet d'expliciter le principe de dualité selon lequel toute voie est fonction d'une autre au moins.

Fin

Pierre-André Stucki

 

Pour poursuivre votre réflexion à propos de la reconnaissance, vous pouvez aller voir les fiches ou groupes de fiches suivants :

La reconnaissance mutuelle

La foi chrétienne comme reconnaissance

L'échec comme critère théologique

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[1] Par exemple à la dualité de la science et de la religion, de la science et de la politique, etc.